Isaline Pfefferlé, 2018 :
Flurina Badel (*1983) & Jérémie Sarbach (*1991), De Novo, 2018, HD video, 35’06’’, Musée d’art du Valais, Sion, inv. BA 3473, achat en 2018 Réalisée en 2018 par les artistes suisses Flurina Badel & Jérémie Sarbach (Badel/Sarbach), De Novo est une œuvre audio-visuelle issue du cycle de création éponyme. Cet ensemble, compilant des performances et des photographies, des œuvres plastiques et des installations, questionne le paysage et sa construction ainsi que la place occupée par l’être humain dans l’environnement. La vidéo est l’aboutissement des recherches menées entre 2016 et 2018 et se décline comme un lexique visuel de symboles liés à des thématiques sociétales contemporaines. Rythmée par une bande originale aux sonorités expérimentales, elle exhibe durant plus d’une demi-heure les déambulations et les rencontres fortuites de figures anonymes, de paysages surréalistes et de figures anthropomorphes étrangement familières. Les doigts, vecteurs de sens à l’ère de la communication numérique, s’imposent rapidement dans l’iconographie. Badel/Sarbach exploitent à l’infini le motif digital et s’essaient à la transcription d’une typologie de figures sociales constituées exclusivement de doigts : l’artiste et la sacralité de l’atelier, lieu intime de la création ; le pêcheur, solitaire et patient ; le marcheur en pleine ascension, bravant la cime aiguisée de la montagne sublime ; le joueur de carte et la collectivité sociale ; une Vénus de Willendorf, symbole ancestral de fertilité ; un Narcisse contemplant son reflet, etc. L’œuvre s’attarde ensuite sur différents comportements socio-culturels renvoyant à des thématiques actuelles comme l’écologie, la mondialisation ou encore la gentrification. On rencontre par exemple un sapin secoué par des bois de cerf dont la carnation est similaire à la peau blanche (1) - possible référence aux représentations post-coloniales de l’homme blanc européocentré. En intégrant littéralement l’être humain au phénomène de destruction des arbres par le tégument des bois des cerfs, Badel/Sarbach dénoncent l’impact, parfois inconscient, que nous avons sur l’environnement. Dans un registre tout aussi cynique et métaphorique, une banane dont la chair est sculptée de containers tourne sur elle-même. Contrainte par sa forme courbe, elle parodie le mouvement d’un paquebot – véritable ouroboros de l’import/export en eaux internationales – et dessine inlassablement dans les flots la trace de la mondialisation. De son côté, la figure de l’alpiniste est occupée à faire corps avec la nature, symbolisée par différents types de paysages : de montagne, de glace, d’outre-mer et du désert. C’est comme si la nature ne se résumait qu’à ces quatre projections ou à une végétation domestiquée, évoquée par les monticules d’herbes triangulaires taillés au cordeau. D’où provient cette pensée singulière de la nature en tant que paysage ? Quelle est la valeur de nos représentations environnementales ? Pouvons-nous objectivement faire l’expérience de la nature, de ses propriétés biologiques et topologiques ? Les plans se suivent, les scènes s’enchainent, se complètent, parfois même se court-circuitent. En latin, « de novo » signifie le recommencement et la nouveauté : le titre donne un sens à cette œuvre cyclique. La temporalité s’effrite et la présentation en loop permet de questionner la dualité de sa nature : le temps de l’œuvre et le temps de la narration. Les saisons défilent, les actions se répètent, tributaires de la technicité imposée par le montage de la vidéo. L’intrigue d’ouverture se retrouve dans la scène finale : les mineurs récoltent toujours les cailloux tandis que la main du créateur s’en est allée : seules les traces de son passage – la poussière résiduelle du bloc de terre à modeler – subsistent. La mise en abyme de la main de l’artiste, du démiurge, célèbre le statut initialement artisanal de De Novo et rappelle le déterminisme sous-jacent à l’œuvre, ainsi que la nature contingente de l’art et de sa fonction. 1) Flurina Badel & Jérémie Sarbach, Antler (De Novo) I, 2016, polyuréthane et bois, 240 cm x 90 cm x 100 cm, inv. FCD 162, achat en 2016. --- Flurina Badel (*1983) & Jérémie Sarbach (*1991), De Novo, 2018, HD-Video, 35’06’’, Kunstmuseum Wallis, Sitten, Inv. BA 3473, Ankauf 2018 De Novo ist ein 2018 von den Schweizer Kunstschaffenden Flurina Badel & Jérémie Sarbach (Badel/Sarbach) produziertes audiovisuelles Werk, das Teil eines gleichnamigen Werkzyklus ist. Dieses Ensemble, das Performances und Fotografien, plastische Arbeiten und Installationen vereint, befasst sich mit der Landschaft und ihrer Konstruktion sowie mit dem Platz, den der Mensch in seiner Umwelt einnimmt. Das Video beruht auf Erkundungen, die zwischen 2016 und 2018 unternommen wurden, und ist eine Art visuelles Lexikon mit Symbolen, die sich auf heutige gesellschaftliche Themen beziehen. Von einem Soundtrack mit experimentellen Klängen begleitet, zeigt es mehr als eine halbe Stunde lang Bewegungen und zufällige Begegnungen anonymer Figuren, surrealistischer Landschaften und seltsam vertrauter anthropomorpher Figuren. Die Finger, Richtungsvektoren im Zeitalter der digitalen Kommunikation, setzen sich rasch in der Ikonografie durch. Badel/Sarbach nutzen das digitale Motiv ad infinitum und suchen eine Typologie sozialer Figuren zu erstellen, die ausschliesslich aus Fingern bestehen: der Künstler und der sakrale Charakter des Ateliers als intimer Schaffensort; der einsame und geduldige Angler; der Bergsteiger, der dem scharfen Grat des erhabenen Gebirges trotzt; der Kartenspieler und die soziale Gemeinschaft; eine Venus von Willendorf, uraltes Symbol der Fruchtbarkeit; ein Narziss, der sein Spiegelbild betrachtet, usw. Zudem beschäftigt sich das Werk mit verschiedenen soziokulturellen Verhaltensweisen, die sich auf aktuelle Themen wie Ökologie, Globalisierung oder Gentrifizierung beziehen. So begegnet man einer Tanne, die von einem Hirschgeweih geschüttelt wird, dessen Farbe der weissen Haut gleicht (1) – möglicherweise ein Hinweis auf postkoloniale Darstellungen des europazentrierten weissen Manns. Durch den buchstäblichen Einbezug des Menschen in das Phänomen der Beschädigung von Bäumen durch den Bast eines Hirschgeweihs kritisieren Badel/Sarbach unseren zum Teil unbewussten Einfluss auf die Umwelt. Auf einer ebenso zynischen wie metaphorischen Ebene dreht sich eine aus Containern geschaffene Banane um sich selbst. Durch ihre gekrümmte Form behindert, parodiert sie die Bewegung eines Ozeanriesen – ein echter Ouroboros (Selbstverzehrer) des Imports/Exports in internationalen Gewässern – und zieht unermüdlich die Spur der Globalisierung in die Wellen. Der Bergsteiger bemüht sich seinerseits, eine Einheit mit der Natur zu schaffen, die durch verschiedene Landschaftsarten wie Berg, Eis, Lapislazuli und Wüste symbolisiert wird. Als ob sich die Natur auf diese vier Projektionen oder eine domestizierte Vegetation beschränken würde, die durch wie mit der Richtschnur gestaltete dreieckige Grashügel angedeutet wird. Woher kommt dieser eigenartige Gedanke der Natur als Landschaft? Welchen Wert haben unsere Umweltdarstellungen? Können wir die Natur, ihre biologischen und topologischen Eigenschaften objektiv erfassen? Die Abläufe folgen sich, die Szenen reihen sich aneinander, ergänzen sich, schliessen sich manchmal sogar kurz. Auf Latein bedeutet «de novo» Wiederanfang und Neuheit: Der Titel gibt diesem zyklischen Werk einen Sinn. Die Zeitlichkeit zerfällt, und dank der Präsentation in einer Endlosschleife lässt sich die Dualität ihrer Natur hinterfragen: die Zeit des Werkes und die Zeit der Erzählung. Die Jahreszeiten ziehen vorüber, und die Aktionen wiederholen sich, da sie von der durch die Videomontage bedingten Technizität abhängig sind. Der Anfangsplot findet sich in der Schlussszene wieder: Die Bergarbeiter sammeln immer noch Steine, während die Hand des Künstlers verschwunden ist: Nur noch Spuren seiner früheren Anwesenheit – Staubreste des zu modellierenden Lehmblocks – bleiben übrig. Die «Mise en abyme» der Hand des Künstlers und Demiurgen feiert den ursprünglich handwerklichen Status von De Novo und erinnert an den zugrunde liegenden Determinismus des Werks sowie an die Kontingenz der Kunst und ihrer Funktion. 1) Flurina Badel & Jérémie Sarbach, Antler (De Novo) I, 2016, Polyurethan und Holz, 240 cm x 90 cm x 100 cm, Inv. FCD 162, Ankauf 2016.