Marguerite Burnat-Provins (1872 - 1952, peintre, écrivaine, illustratrice, décoratrice)
Petits tableaux valaisans / Petits tableaux valaisans [Kleine Walliser Bilder] / Petits tableaux valaisans [Small Valaisan Paintings]


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Raquel André, 2012 :

Marguerite Burnat Provins (1872–1952), Petits tableaux valaisans, 1903, livre illustré, 19 x 25 x 3 cm, Musée d'art du Valais, Sion, inv. BA 1253, achat en 1970 Imprimés en 1903 chez Säuberlin & Pfeiffer à Vevey, les Petits Tableaux valaisans constituent le premier livre de Marguerite Burnat-Provins. Ils furent salués par la critique de l’époque comme un chef-d’œuvre. En une succession de cinquante courts chapitres ou « tableaux » indépendants les uns des autres, l’ouvrage mêle écriture et illustration (lettrines, cul-de-lampes, planches hors texte). Tous les éléments tirent leur inspiration de la commune de Savièse, dont les armoiries figurent en pleine page en tête du livre et où Burnat-Provins séjourne régulièrement depuis 1898. La publication d’ouvrages illustrés permet à Burnat-Provins de concilier sa double passion pour la peinture et l'écriture. Aucun de ses autres livres n’atteindra toutefois la qualité du premier. Un projet d’illustration de son texte le plus célèbre, Le livre pour toi, publié à Paris en 1907, n’aboutira pas . L'engagement de l'artiste dans les Petits Tableaux valaisans est total, chaque détail est étudié, pesé et choisi minutieusement par l’auteure : le papier, la toile et les rubans, les caractères d’imprimerie, la mise en page, ou encore l’exécution des gravures sur bois par la maison Martin & Cie à Ardon d’après ses propres dessins. Bien que la qualité des textes ait également été louée, c'est surtout la collaboration étroite et complice entre imprimeurs, graveurs et auteure qui a fait considérer cet ouvrage comme une œuvre d'art totale, réalisée dans le plus pur esprit Art nouveau. Les Petits Tableaux valaisans chantent le Valais à travers la voix et le regard d’une artiste. C’est une œuvre-miroir où l'on ne perçoit Savièse qu’à travers les sensations, les sentiments, la perception et la vision de Burnat-Provins. Par ses choix esthétiques, l’ouvrage met à distance la réalité. Sur la toile rugueuse vert-olive de la couverture se déploient le titre, le nom de l’auteure et des physalis ornementaux : l’alliance entre rudesse rurale et raffinement urbain est annoncée d’emblée comme un programme. Le choix de la gravure sur bois comme technique de reproduction des compositions décoratives de l’artiste, alors que les nouveaux procédés d’impression photogravée ont fait leurs preuves, relève d’un primitivisme associant espace rural et passé quasi médiéval. Quant au texte, il emprunte volontiers un titre ou une expression au patois pour renforcer l’impression d’exotisme et d’étrangeté du lecteur face à la communauté saviésanne. A chaque page, le temps est manifesté dans les motifs récurrents des saisons, des âges, de l’histoire ou de la destruction. A chaque page, il est nié par la peinture d’une société immobile et d’usages immémoriaux, enracinés dans le passé : « De la mèche du fouet, la femme touche le flanc rond du Botch, la croupe sèche du Mulet, et le groupe forme, avec la carcasse longue de la charrue, la ligne d’une estampe d’autrefois. / Le servage n’est point aboli, la glèbe tient le paysan plus ferme que jadis le seigneur au gant de fer, et l’impression demeure que, dix siècles plus tôt, à la même place, le même tableau a vécu sous le soleil déjà pâlissant de septembre, car l’Homme seul varie dans la Nature immuable(1). » Pour dire l’environnement, la population, les traditions, les animaux ou les objets familiers, l’artiste alterne l’ambiance des tableaux. Textes et images recourent à un mélange subtil d'idéalisme et de mélancolie. Dans une vision très rousseauiste, Burnat-Provins présente une population montagnarde vivant en symbiose avec la nature. Mère nourricière, celle-ci apporte le bonheur et tout ce qui est nécessaire à la vie. Refuge de paix et de silence, Savièse apparaît comme un lieu privilégié, loin de l' « entassement noir des villes(2) » . La communauté intègre même dans son harmonie naturelle les déshérités, les fous et les malheureux. Pourtant, cette communauté apparemment idéale est en sursis. Elle est menacée de transformation ou de disparition, et un voile de mélancolie couvre l'ensemble de l'ouvrage. Plusieurs tableaux allégorisent le cycle terminal de l’homme et de la nature, comme Les colchiques (« dans leur parure endeuillée, il est une tristesse »), Les enfants (« Mais hélas! Les Enfants ne tendent leur joyeuse innocence que vers l’obscurité de l’avenir »), Les vieux (« trop souvent arrêtés près des tombes(3) ») . Le tableau intitulé L'homme qui chantait se lit dans la perspective de la perte inévitable de ce monde habité par « un peuple enfant(4) » , qui semble à l'abri de l'évolution : « Ceux-là conservent, en leur rusticité, la saveur des bons fruits, ils ont la peau forte, les yeux droits, l’âme fraîche, il restent dans le giron maternel, et leurs vices, innocents dans leur impudence, se voient comme les fautes des pierres et les défauts des écorces(5). » Burnat-Provins le sait bien : seules l’esthétisation et la poétisation du réel sont capables de protéger les beautés menacées de la vie rurale, sinon dans la réalité, du moins dans l’art et dans la mémoire. (1) Le labour, p. 79. (2) L'homme qui chantait, p. 121. (3) Respectivement pp. 12, 129, 16. (4) Le béniton, p. 51. (5) L’homme qui chantait, p. 122 in: L’Ecole de Savièse. Une colonie d’artistes au coeur des Alpes vers 1900, dir. Pascal Ruedin, Sion : Musée d’art du Valais, Milan : 5 Continents Editions, 2012, pp. 240-243 --- Marguerite Burnat Provins(1872–1952), Petits tableaux valaisans (kleine Walliser Bilder), 1903, Illustriertes Buch, 19 × 25 × 3 cm, Kunstmuseum Wallis, Sitten, Inv. BA 1253, Ankauf 1970. Das im Jahr 1903 bei Säuberlin & Pfeiffer in Vevey gedruckte Buch Petits tableaux valaisans (kleine Walliser Bilder) war das Erstlingswerk von Marguerite Burnat-Provins. Die damalige Kritik begrüsste es als Meisterwerk. In einer Reihe von 50 kurzen, untereinander unabhängigen Kapiteln oder «Bildern» vereint das Werk Texte und Illustrationen (Zierbuchstaben, Schlussornamente, Bildtafeln). All diese Elemente sind von der Gemeinde Savièse inspiriert, deren Wappen eine Seite am Buchanfang ziert. Die Künstlerin hielt sich ab 1898 regelmässig dort auf. Mit der Publikation illustrierter Bücher konnte Burnat-Provins ihre Leidenschaft für Malerei und Schriftstellerei unter einen Hut bringen. Keines ihrer Folgewerke erreichte jedoch die Qualität des ersten. Ein Illustrationsprojekt für ihren bekanntesten Text, Le livre pour toi (Das Buch für dich), der 1907 in Paris veröffentlich wurde, führte sie nicht zu Ende . Für Petits Tableaux valaisans war die Hingabe der Künstlerin umfassend, bis ins kleinste Detail hatte sie alles genau beobachtet, durchdacht, abgewogen und mit grösster Sorgfalt ausgelesen: Papier, Leinwand und Bänder, Schriftart, Gestaltung und Ausführung der Holzstiche durch Martin & Cie in Ardon nach ihren eigenen Zeichnungen. Obwohl auch die Qualität der Texte gelobt wurde, war es vor allem die enge Zusammenarbeit zwischen Buchdrucker, Grafiker und Autorin, dank der dieses Werk als umfassendes Kunstwerk in der Gesinnung des Jugendstils galt. Das Buch Petits Tableaux valaisans besingt das Wallis in der Stimme und aus der Sicht einer Künstlerin. Es ist gewissermassen ein Spiegel; man nimmt Savièse allein durch die Eindrücke, die Gefühle, die Auffassung und die Sicht Burnat-Provinsʼ wahr. Durch die ästhetische Wahl der Künstlerin hält das Werk die Realität auf Distanz. Auf der rauen, olivgrünen Leinwand des Umschlags sind der Titel, der Name der Autorin und dekorative Physalis zu sehen: die Verbindung zwischen ländlicher Rauheit und städtischem Raffinement wird bereits eingangs einem Programm gemäss angekündigt. Die Tatsache, dass die Künstlerin als Reproduktionstechnik für ihre dekorativen Kompositionen den Holzschnitt gewählt hatte, obwohl die neuen Edeldruckverfahren damals ihre Qualitäten bereits unter Beweis gestellt hatten, zeugt von einem Primitivismus, der den ländlichen Raum mit einer beinahe mittelalterlichen Vergangenheit verbindet. Der Text entlehnt oftmals einen Titel oder einen Ausdruck aus der einheimischen Mundart, um den exotischen Eindruck und die Fremdheit des Lesers gegenüber der Savièser Gemeinschaft zu verstärken. Seite um Seite wird die Zeit zum Ausdruck gebracht, mit Motiven wie Jahreszeiten, Lebensalter, Geschichte oder Zerstörung. Seite um Seite wird die Zeit geleugnet, mit Bildern einer unveränderlichen Gesellschaft und uralter, in der Vergangenheit verwurzelter Bräuche: «Mit der Peitschenschnur berührt die Frau die runde Flanke des Rinds, die trockene Kruppe des Maultiers und die Gruppe bildet, mit dem langgezogenen Rumpf des Wagens die Linie eines Stichs von früher. / Die Leibeigenschaft ist nicht aufgehoben, die Scholle hält den Bauern fester als früher der Grundherr mit eisernem Handschuh, und der Eindruck bleibt, dass schon sechs Jahrhunderte früher, am selben Ort, das selbe Bild unter der im September schon blassen Sonne existiert hat, denn allein der Mensch verändert sich in der unveränderlichen Natur.»(1) Zur Schilderung der Umgebung, der Bevölkerung, der Traditionen, der Tiere oder der Alltagsgegenstände variiert die Künstlerin die Stimmung der Bilder. Texte und Bilder bedienen sich einer subtilen Mischung aus Idealismus und Melancholie. In einer von Rousseau geprägten Sichtweise präsentiert Burnat-Provins eine in Symbiose mit der Natur lebende Bergbevölkerung. Als Nährmutter liefert diese das Glück und alles, was es zum Leben braucht. Als Hafen des Friedens und der Stille scheint Savièse ein bevorzugter Ort zu sein, weit entfernt von den «schwarz aufgetürmten Städten»(2). In ihrer natürlichen Harmonie integriert die Gemeinschaft sogar die Benachteiligten, Verrückten und Unglücklichen. Doch diese scheinbar ideale Gemeinschaft ging ihrem Ende entgegen, sie würde sich verändern oder verschwinden, und ein Schleier der Melancholie umgibt das gesamte Werk. Mehrere Bilder sind Allegorien des letzten Zyklus des Menschen und der Natur, wie Die Herbstzeitlosen («Traurigkeit liegt in ihrem Trauerschmuck»), Die Kinder («Doch leider streben die Kinder in ihrer fröhlichen Unschuld nur hin zum Dunkel der Zukunft»), Die Alten («zu oft bei den Gräbern innhaltend»)(3). Das Bild Der singende Mann ist im Hinblick auf den unumgänglichen Verlust dieser Welt zu verstehen, die von einem «kindlichen Volk» bewohnt wird, das vor der Entwicklung bewahrt ist(4) : «Diese bewahren in ihrer Urtümlichkeit den Geschmack der guten Früchte, ihre Haut ist gebräunt, ihr Blick vorwärts gerichtet, ihre Seele unverdorben; sie bleiben im Schoss der Mutter und ihre in ihrer Schamlosigkeit unschuldigen Fehler werden wie die Fehler eines Steins oder die Mängel der Rinde gesehen.»(5) Burnat-Provins weiss es genau: allein die Ästhetisierung und die Poetisierung des Realen können die bedrohte Schönheit des ländlichen Lebens schützen, wenn nicht in Wirklichkeit, dann wenigstens in der Kunst und in der Erinnerung. (1) Le labour, S. 79. (2) L’homme qui chantait, S. 121. (3) S. 12, 129, 16. (4) Le béniton, S. 51. (5) L’homme qui chantait, S. 122 in: Die Schule von Savièse. Eine Künstlerkolonie in den Alpen um 1900, Leit. Pascal Ruedin, Milan : 5 Continents, Sitten : Kunstmuseum, 2012, S. 240-243.