Laurent Sester et Pascal Ruedin, 2012 :
Raphael Ritz (1829-1894), Pèlerinage à Longeborgne ou Sermon à Longeborgne, 1868, huile sur toile, 100,5 x 89 cm, Musée d’art du Valais, Sion, inv. BA 1639, don de la Fondation Michel Lehner en 2000 Alors que son père peintre Laurent-Justin Ritz (1796-1870), installé à Sion, répond encore aux commandes de portraits et de tableaux d'églises, Raphael Ritz quitte le Valais en 1853 pour se former à l'Académie des beaux-arts de Düsseldorf. Dans la ville rhénane où il ouvre un atelier et vit jusqu'en 1875, il est confronté à un nouveau système, orienté vers le marché. La concurrence entre les peintres force ceux-ci à la distinction de leur production. Et c'est pour répondre à l'attente de sujets nouveaux et originaux émanant de sa clientèle allemande que Raphael Ritz invente le motif valaisan. Il fait donc de nombreux séjours dans son canton natal pour en tirer des sujets qui, tel ce Pèlerinage à Longeborgne, sont exécutés dans son atelier de Düsseldorf, sur la base de croquis pris sur place, puis de dessins préparatoires et d’esquisses de plus en plus élaborés (cat. pp.70 et 71). Le tableau représente un pèlerinage à l'ermitage de Longeborgne situé près de Sion. Sur la petite terrasse de la chapelle encadrée par des falaises se tient un groupe de pèlerins. Les vêtements et les chapeaux féminins sont encore géographiquement indifférenciés à l’époque où Ritz exécute ce tableau ; ils ne permettent donc pas d’établir la provenance des personnages. Tout au plus peut-on affirmer qu’il s’agit de paysannes valaisannes. C’est en effet dans la première moitié du XIXe siècle que les femmes de la campagne adoptent la mode du chapeau de paille qu’elles ornent de rubans en soie ou en velours. L’aristocratie locale, qui avait jusqu’alors l’apanage de ce type de couvre-chef, l’abandonne presque aussitôt (1). Un capucin vêtu d’une robe de bure prêche sur une chaire. La représentation d'une assemblée écoutant le religieux avec une attention variable permet à Ritz de peindre différentes attitudes. En construisant ses toiles par agglomération de pièces rapportées, il puise dans un « catalogue » de figures et d'attitudes stéréotypées, que l'on retrouve dans d'autres tableaux de l'artiste et qui évoquent l'humanité entière à travers une série de statuts sociaux et de types humains caractéristiques de la peinture de genre : ecclésiastiques, bourgeois et paysans, vieillards mélancoliques, pieuses jeunes femmes et enfants en larmes. On retrouve, par exemple, l’aïeule du premier plan et l’homme assis derrière elle dans les tableaux Veille de fête et Cérémonie dominicale sur le col du Sanetsch (cat.pp. 72 et 75). Par cette démarche, l'artiste universalise la portée d'une représentation apparemment très localisée voire anecdotique. Le décor rocheux autour des personnages renforce le sentiment d'écrasement traduit par le dos courbé des pèlerins en prière. Cette impression naît aussi d'une reconstruction du paysage, car Ritz a utilisé deux points de vue différents : l'un pour la chapelle et les pèlerins, l'autre pour le défilé resserré de montagnes sur la gauche. Cette construction lui permet d'insister sur la communauté religieuse qui réunit ces figures dans un même lieu retiré. Plusieurs éléments de la composition symbolisent la fugacité du temps : un cadran solaire, une horloge mécanique, des croix de cimetière suspendues au-dessus du précipice, l'eau d'une fontaine (celle-ci pouvant aussi symboliser le baptême et la vie éternelle). Le décor commente pour ainsi dire le contenu du prêche : un discours sur la brièveté de la vie et la vanité des préoccupations terrestres au regard de l'au-delà. C’est ainsi que, tout en étant riche d'une dimension quasi allégorique évoquant les valeurs et la dignité de la peinture d'histoire, l’œuvre de Ritz inaugure – presque malgré elle – une vision exotique et primitiviste du Valais rural et montagnard, que la génération des artistes de l’Ecole de Savièse va bientôt transformer en représentation iconique. 1) Aimable communication de Thomas Antonietti, ethnologue et conservateur du Département d’histoire contemporaine du Musée d’histoire du Valais in: “Raphael Ritz, Pèlerinage à Longeborgne ou Sermon à Longeborgne, 1868”, dans L’Ecole de Savièse. Une colonie d’artistes au coeur des Alpes vers 1900, dir. Pascal Ruedin, Milan : 5 Continents, Sion : Musée d’art, 2012, pp. 68-69, cat. no 1. --- Raphael Ritz (1829–1894), Wallfahrt nach Longeborgne oder Predigt in Longeborgne, 1868, Öl auf Leinwand , 100,5 × 89 cm, Kunstmuseum Wallis, Sitten, Inv.-Nr. 1639, Schenkung der Michel-Lehner-Stiftung 2000 Während sein Vater, der Maler Laurent-Justin Ritz (1796–1870) noch Porträts und Kirchengemälde auf Bestellung malte, verliess Raphael Ritz 1853 das Wallis, um sich an der Kunstakademie Düsseldorf ausbilden zu lassen. In der Stadt am Rhein, wo er ein Atelier eröffnete und bis 1875 lebte, wurde er mit einem neuen, auf den Markt ausgerichteten System konfrontiert. Aufgrund der Konkurrenz unter den Malern waren diese gezwungen, sich durch ihre Produktion von den anderen abzuheben. Um der Erwartung seiner deutschen Kundschaft nach neuen, originellen Motiven nachzukommen, erfand Raphael Ritz das Walliser Motiv. Er hielt sich folglich immer wieder in seinem Heimatkanton auf, um Motive zu sammeln. Diese arbeitete er dann, wie für die Wallfahrt nach Longeborgne, in seinem Düsseldorfer Atelier anhand von Entwürfen, die er vor Ort gemacht hatte, zu vorbereitenden Zeichnungen und immer detaillierteren Skizzen aus (Kat. S. 70-71). Das Bild zeigt eine Wallfahrt zur Klause von Longeborgne, in der Nähe von Sitten. Auf der kleinen Terrasse vor der von Felswänden umgebenen Kapelle ist eine Gruppe Pilger zu sehen. Die Kleider und Hüte der Frauen wiesen zur Zeit, als Ritz das Bild malte, noch wenig geografisch bedingte Unterschiede auf; es ist daher nicht möglich, die Herkunft der dargestellten Personen zu bestimmen. Man kann höchstens bestätigen, dass es sich um Walliser Bäuerinnen handelt. In der Tat kam der mit Seiden- oder Samtbändern geschmückte Strohhut bei den Frauen auf dem Land in der ersten Hälfte des 19. Jahrhunderts in Mode. Die örtliche Oberschicht, welche diese Art Kopfbedeckung bis dahin für sich in Anspruch genommen hatte, gab sie alsbald auf (1). Ein Kapuziner in Mönchskutte predigt auf der Kanzel. Die Darstellung einer Gemeinschaft, welche dem Mönch mit unterschiedlicher Aufmerksamkeit zuhört, ermöglichte es Ritz, verschiedene Verhaltensweisen und Haltungen zu malen. Das Gemälde ist eine Kombination einzelner Elemente. Der Künstler schöpfte aus einer Art Katalog von Figuren und typischen Körperhaltungen, die bei ihm auch in anderen Bildern anzutreffen sind. Durch die verschiedenen gesellschaftlichen Stellungen und die ausgeprägten Menschentypen, welche für die Genremalerei kennzeichnend sind – Geistliche, Bürger, Bauern, melancholische Alte, fromme junge Frauen und weinende Kinder –, verweist er auf die gesamte Menschheit. Beispielsweise trifft man die alte Frau vorne in der Bildmitte und den hinter ihr sitzenden Mann in den Bildern Am Tag vor dem Fest und Sonntagsfeier auf dem Sanetschpass (Kat. S. 72-75) an. Durch dieses Vorgehen verallgemeinert der Künstler die Tragweite einer scheinbar sehr lokalen, ja anekdotischen Darstellung. Die felsige Kulisse verstärkt das erdrückende Gefühl, das im gekrümmten Rücken der betenden Pilger zum Ausdruck kommt. Der selbe Eindruck entsteht ausserdem aufgrund der Rekonstruktion der Landschaft, da Ritz zwei verschiedene Blickpunkte verwendet hat: einen für die Kapelle und die Pilger, den anderen für die Felsen und Berge auf der linken Seite. Mit dieser Konstruktion betont er die Glaubensgemeinschaft, welche diese Menschen an einem abgelegenen Ort vereint. Mehrere Elemente der Komposition symbolisieren den raschen Verlauf der Zeit: eine Sonnenuhr, eine mechanische Uhr, die wie über dem Abgrund hängenden Kreuze auf dem Friedhof, das Wasser des Brunnens (dieses kann auch für die Taufe und das ewige Leben stehen). Die Kulisse ist eine Art Kommentar zum Inhalt der Predigt: die Kürze des Lebens und die Nichtigkeit der irdischen Sorgen im Hinblick auf das Jenseits. So läutet Ritzʼ Werk, trotz seiner beinahe allegorischen Dimension, welche die Werte und Würde der Historienmalerei in Erinnerung ruft, beinahe gegen seinen Willen, die exotische, primitivistische Sichtweise des Wallis als ländliche Region in den Bergen ein, welche die Malergeneration der Schule von Savièse bald in eine ikonische Darstellung umwandeln würde. 1) Diese Informationen stammen freundlicherweise von Thomas Antonietti, Ethnologe und Konservator für zeitgenössische Geschichte des Walliser Geschichtsmuseums in: Laurent Sester et Pascal Ruedin, “Raphael Ritz, Wallfahrt nach Longeborgne oder Predigt in Longeborgne, 1868”, in Die Schule von Savièse. Eine Künstlerkolonie in den Alpen um 1900, Leit. Pascal Ruedin, Milan : 5 Continents, Sitten : Kunstmuseum, 2012, S. 68-69.