Stéphanie Lugon, 2013 :
Valentin Carron (*1977), Clair Matin III, 2009, polystyrène, fibre de verre, résine acrylique, bois, métal, laque acrylique, 500 x 350 x 25 cm, Musée d'art du Valais, Sion, inv. BA 3078 Clair Matin III plane au-dessus de nos têtes, suspendu au plafond à l’image d’une épée de Damoclès, piège oppressant et inquiétant. On en retiendrait presque son souffle en évoluant sous son imposante silhouette, afin d’en conjurer la menace physique. Entre sculpture et élément architectural, l’œuvre de Valentin Carron (*1977) procède d’une variation démesurée de la pergola, structure typique des constructions vernaculaires valaisannes. D’origine italienne, elle est constituée d’une ossature de poutres en bois horizontales disposées en forme de grille, soutenue par des poutres verticales. À la fois support pour la vigne et lieu de détente et d’ombrage, elle compte parmi les caractéristiques de l’architecture extérieure des mazots, synonyme d’occasion sociale, de réunion et de confort. Revendiquant son appartenance à la périphérie – géographique et culturelle –, l’artiste valaisan Valentin Carron questionne la notion de territoire et les signes qui le traduisent. Ses œuvres, par le biais de leurs proportions et de leur matériau, opèrent une distanciation face à l’iconographie d’un contexte régional, en l’occurrence valaisan. Sa pratique présente une critique des objets culturels et une interrogation de leur valeur et de leur portée, dans une trajectoire allant du local au global. En décuplant les dimensions de sa pergola, Carron marque son territoire dans l’espace d’exposition de manière monumentale, via une surenchère virile. La charpente présente l’allure d’une pièce d’art minimal – dans le sillage d’un Carl Andre ou d’un Richard Serra – tandis que son matériau et sa production en série font référence au le Pop Art. Evacuant la noblesse du bois, la sculpture est réalisée en polystyrène, résine et fibre de verre, imitant l’aspect formel des poutres, tout en étant creuse et légère. La peinture acrylique gris clair achève le détournement de l’élément initial. Ce double glissement – taille et facture – induit une tension entre apparence et réalité, sincérité et faux-semblant, et met en perspective le processus de construction identitaire de la région. Implémentés au début du XXe siècle, notamment par les peintres de l’Ecole de Savièse (1) , les symboles du Valais idéal et authentique sont aujourd’hui encore relayés par l’industrie touristique et commerciale. Le retour aux prétendues sources constitue un art de vivre à la mode et la pergola participe, dans l’imaginaire collectif, à composer la terrasse parfaite, devenant ainsi signe d’une certaine réussite sociale. Angoissante, l’œuvre Clair Matin III dénonce la superficialité d’un patrimoine soi-disant authentique. La douceur de son titre, tirée du nom d’une maison ou d’un chalet, évoque néanmoins la quête de beauté des artisans régionaux et des indigènes, démarche touchante et poétique. Malgré son approche critique, Carron conserve une fascination empreinte d’affection pour les artefacts culturels qui l’entourent. Né en 1977 à Martigny, Valentin Carron vit et travaille à Fully. Représentant de la Suisse à la Biennale de Venise en 2013, il expose régulièrement en Suisse et à l’étranger et bénéficie d’une importante reconnaissance internationale. 1)Voir l’exposition Welcome to Paradise : l’Ecole de Savièse, une colonie d’artistes au cœur des Alpes vers 1900, Musée d’art du Valais, Sion, 23 juin 2012 – 6 janvier 2013. --- Valentin Carron (*1977), Clair Matin III, 2009, Polystyrol, Glasfaser, Acrylharz, Holz, Metall, Acryllack, 500 x 350 x 25 cm, Kunstmuseum, Sitten, Inv. BA 3078 Clair Matin III schwebt über unseren Köpfen, an der Decke aufgehängt wie ein Damoklesschwert, eine beklemmende, beunruhigende Falle. Man möchte fast den Atem anhalten, wenn man sich unter seiner eindrucksvollen Silhouette bewegt, um die physische Bedrohung zu bannen. Das Werk von Valentin Carron (*1977), halb Skulptur, halb Bauelement, beruht auf einer riesigen Variation der Pergola, einer typischen Konstruktion der Walliser Regionalarchitektur. Sie ist italienischer Herkunft und besteht aus einem Gerüst gitterförmig angeordneter horizontaler Holzbalken, das auf vertikalen Stützen aufliegt. Träger für Weinreben und zugleich schattiger Erholungsort, zählt die Pergola zu den typischen Aussenelementen der Chalet-Architektur, Synonym für Geselligkeit, Gemütlichkeit und Komfort. Der Walliser Künstler Valentin Carron, der für sich beansprucht, zur – geografischen und kulturellen – Peripherie zu gehören, setzt sich hier mit dem Begriff des Territoriums und den dieses wiedergebenden Zeichen auseinander. Mittels ihrer Proportionen und ihres Materials distanzieren sich seine Werke von der Ikonografie eines regionalen, in diesem Fall Walliser, Kontextes. Seine Tätigkeit besteht aus einer Kritik der kulturellen Objekte und einer Infragestellung ihres Werts und ihrer Tragweite in einer Richtung, die vom Lokalen zum Globalen führt. Indem Carron die Abmessungen seiner Pergola stark vergrössert, markiert er sein Territorium im Ausstellungsraum in männlicher Überbietung auf monumentale Weise. Das Gerüst sieht aus wie ein minimalistisches Kunstwerk in der Nachfolge eines Carl Andre oder eines Richard Serra, während sich Material und Serienproduktion auf die Pop Art beziehen. Um den edlen Charakter des Holzes auszuschliessen, besteht die Skulptur aus Polystyrol, Harz und Glasfaser und ahmt das formale Aussehen von Balken nach, obwohl sie hohl und leicht ist. Die hellgraue Acrylfarbe vollendet die Verfremdung des ursprünglichen Elements. Diese doppelte Verschiebung – Grösse und Machart – ruft eine Spannung zwischen Schein und Realität, Aufrichtigkeit und Verstellung hervor und rückt den Prozess des identitätsstiftenden Bauens in der Region in den Blickpunkt. Die Symbole des idealen und authentischen Wallis, die im frühen 20. Jahrhundert insbesondere von den Malern der Schule von Savièse (1) eingeführt wurden, werden auch heute noch von Tourismus und Gewerbe hochgehalten. Die Rückkehr zu den angeblichen Wurzeln zeugt von einer Lebenskunst, die augenblicklich Mode ist, und im Kollektivbewusstsein ist die Pergola ein Bestandteil der perfekten Terrasse, um so zum Zeichen eines bestimmten sozialen Erfolgs zu werden. Mit seiner beängstigenden Wirkung prangert Clair Matin III die Oberflächlichkeit eines sogenannt authentischen Kulturerbes an. Die sanfte Art seines Titels, der dem Namen eines Hauses oder Chalets nachempfunden ist, erinnert dennoch an die berührende und poetische Suche nach Schönheit der regionalen Handwerker und der einheimischen Bevölkerung. Trotz seines kritischen Ansatzes bewahrt Carron eine von Zuneigung geprägte Faszination für die kulturellen Artefakte, die ihn umgeben. Valentin Carron, der 1977 in Martigny geboren wurde, lebt und arbeitet in Fully. Er vertrat die Schweiz 2013 an der Biennale von Venedig, stellt regelmässig im In- und Ausland aus und geniesst hohe internationale Anerkennung. 1)Vgl. die Ausstellung Welcome to Paradise: l’Ecole de Savièse, une colonie d’artistes au cœur des Alpes vers 1900, Kunstmuseum Wallis, Sitten, 23. Juni 2012 – 6. Januar 2013.