Thomas Antonietti, 2010 :
[NB : notice identique pour les objets MV 12659 a à e, MV 12660 a-k, MV 12662] Emporte-pièces (poinçons et gaufroirs) avec marteau en bois et support de plomb. Les pétales et les feuilles étaient façonnés selon le procédé suivant: les morceaux de papier ou de tissu étaient placés, en plusieurs couches, entre le disque de plomb et l’emporte-pièce. Ce dernier, frappé à l’aide du marteau, venait découper le papier ou le tissu, selon le motif choisi. Les feuilles étaient modelées selon le procédé suivant: pour imprimer les nervures et les veines, elles étaient légèrement humectées puis placées et serrées entre les deux parties du gaufroir. La confection de fleurs artificielles est une des activités les plus importantes des travaux de couvent. Les sœurs parvenaient à des imitations proches des fleurs naturelles, comme celles qu'elles cultivaient dans leur jardin. Comme d'autres travaux de couvent, la fabrication de fleurs est à son apogée au XVIIIe siècle et au début du XIXe siècle. Leur production était une activité à part entière dans la vie du couvent et au sein de l'organisation de ce dernier; la désignation de «fleuriste » était une fonction particulière, exercée surtout par les jeunes sœurs. Les archives du couvent de Collombey mentionnent la fabrication de fleurs artificielles plus fréquemment que d'autres travaux; nous trouvons des documents pour cette activité dès la fin du XVIIIe siècle. Par exemple, la notice nécrologique de sœur Rosalie Marclay (1800-1890) nous rapporte: «Elle s'appliqua dès lors [après avoir prononcé les vœux solennels] à confectionner les fleurs artificielles pour orner les saints autels». Sœur Rosalie exerça à plusieurs reprises la charge de «fleuriste» ou de « maîtresse de fleurs» entre 1826 et 1888. Les objets conservés à Collombey montrent que les sœurs achetaient du matériel préfabriqué, comme des feuilles ou des tiges, et que ces éléments étaient ensuite réunis en fleurs et en bouquets par leurs soins. Une boîte en bois conservée au couvent porte, sur le couvercle, l'inscription suivante: «Mon LHOMER Fleurs 47. Rue de Sèvres Paris». Actuellement, le couvent des Bernardines possède encore une riche collection d'instruments et d'éléments préfabriqués pour la confection de ces fleurs. [NB : donnés au Musée d’histoire du Valais] Les fleurs artificielles ornaient surtout les autels, les reliquaires, les emboîtements ou encore les « petits paradis». Elles avaient également d'autres fonctions dans le quotidien du couvent; les bouquets de fleurs servaient d'offrande pour les Mères Supérieures ou les aumôniers à l'occasion de leur fête. Elles pouvaient aussi être vendues notamment aux paroisses environnantes qui sont devenues les plus grands acheteurs. Le livre de comptabilité du couvent mentionne, en plus des bouquets de fleurs, la confection de «couronnes de fleurs» et de «vases de fleurs en papier». Plus généralement, n'oublions pas que les fleurs sont utilisées très tôt à des fins profanes; les couvents doivent alors concurrencer les ateliers commerciaux. Un tel atelier se trouve décrit dans L'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert qui précise: « Ce travail emploie surtout de la main d'œuvre féminine et des enfants». Romaine Syburra-Bertelletto, Thomas Antonietti, Patrick Elsig, Alain Guerrier, « Bernardine tu seras ! ». Le monastère de Collombey: un patrimoine de 4 siècles, hier und jetzt, 2010, Cahiers du Musée d’histoire du Valais 11, p. 210-211