Yann Gross (* 1981, photographe, vidéaste)
Lion des Montagnes / Lion des Montagnes [Berglöwe] / Lion des Montagnes [Mountain Lion]
(Horizonville)


Picture

Muriel Eschmann Richon, 2013 :

Yann Gross (*1981), Horizonville, 2005-2008, tirages photographiques contrecollés sur aluminium (date des tirages : 2013), Musée d'art du Valais, Sion : • Horizonville, 2005, (5/5), 80 x 96 cm, inv. BA 3304 • Le Gorille, 2005, (2/5), 80 x 96 cm, inv. BA 3305 • Le Slalom du Camion, 2005, (3/5), 80 x 96 cm, inv. BA 3306 • Rothis Western City, 2005, (3/5), 80 x 96 cm, inv. BA 3307 • Line dance, 2005, (4/5), 96 x 80 cm, inv. BA 3308 • Lion des Montagnes, 2005, (3/5), 96 x 80 cm, inv. BA 3309 • Jimmy et le Clio Cross, 2005, (3/5), 96 x 80 cm, inv. BA 3310 • Ours, 2007, (1/5), 96 x 80 cm, inv. BA 3311 • Embouchure de l'Illgraben, 2008, (3/5), 96 x 80 cm, inv. BA 3312 • Marc Swann, 2006, (3/5), 50 x 60 cm, inv. BA 3313 • Lady Harley, 2007, (2/5), 60 x 50 cm, inv. BA 3314 • Cathy Lavanchy, 2007, (2/5), 60 x 50 cm, inv. BA 3315. Non loin de ces montagnes mythiques qui symbolisent si souvent la Suisse, dans une plaine – le fond de la vallée du Rhône – que les touristes traversent sans s'y arrêter, Yann Gross, photographe vaudois, s'est engouffré lentement, à l'occasion d'un roadtrip de trois mois à mobylette, tel le héros du film Straight Story de David Lynch qui parcourt des centaines de kilomètres sur un mini-tracteur et dont le photographe s'est inspiré (1). Explorant ainsi la plaine sans hâte, dans un voyage patient à vitesse réduite, l'artiste, à la recherche de grands espaces et d'aventures (2), interroge un univers qui lui est proche et découvre des modes de vie volontairement exotiques et déphasés. Stetsons, tatouages, chemises de cow-boys et blousons frangés. Les manifestations de la culture américaine règnent sur cet univers photographié de la série Horizonville (3). Une vision mythique des Etats-Unis à travers l'imaginaire « western » (4). Les personnages cherchent, par leur style, leur nom et leur mode de vie, à se démarquer de la région qu'ils habitent (Lion des Montagnes, BA 3309 ; Ours, BA 3311 ; Lady Harley, BA 3314 ; Cathy Lavanchy, BA 3315) et construisent une communauté aux codes particuliers. Ils font vivre des lieux – restaurant (Rothis Western City, BA 3307), hôtel, station essence (Horizonville, BA 3304) – et créent des manifestations (Line Dance, BA 3308). Mais leur Amérique est européanisée lorsque les airstreams se font caravanes, les immenses trucks simples camions (Le Slalom du Camion, BA 3306) et les Harley Davidson vélomoteurs (Jimmy et le Clio Cross, BA 3310). Les symboles, dont l'origine et le sens ne semblent pas importer, sont confus, et les références des « héros » parfois mal maîtrisées, la plupart des personnages n'ayant jamais été aux Etats-Unis. L'ici et l'ailleurs se mélangent. Yann Gross insiste toutefois sur l'idéal américain en documentant son épopée à travers des photographies dont l'esthétique – pose des personnages ou réalisme des représentations - rappelle la tradition américaine en matière d'images documentaires (5). Cette suite d'images est rythmée par des changements d'échelle continus, suivant les thèmes des photographies. La force de ces photographies réside donc aussi dans leur nombre, la série formant un tout indissociable qui compresse une vision mythique des Etats-Unis. A cette représentation, le photographe, par sa vision – qui sait parfois se faire narquoise (6) - , ajoute du glamour et magnifie ce fantasme de l'Amérique à travers des photographies simples, lumineuses, colorées et de format imposant. Les Etats-Unis restent ici une nation idéalisée par les personnages photographiés, avec quelques images fortes, que l'on découvre dans ces photographies offrant l'échantillon condensé d'un rêve. L'American dream. Confrontée en 2012 dans l'exposition Welcome to Paradise (7) aux oeuvres des artistes de l'Ecole de Savièse, la série Horizonville démontre une volonté de s'émanciper d'une communauté dans une ère géographique à l'identité forte mais qui permet pourtant de s'exprimer. Paradoxalement, ce travail nous plonge une nouvelle fois dans les stéréotypes du canton – le Valais comme « réservoir de figures pittoresques et décalées par rapport à la société [...] contemporaine » (8) tels qu'il peut aussi apparaître chez les artistes de l'Ecole de Savièse(9). 1) Joël Vacheron, « Horizonville », dans Yann Gross, Horizonville, Zurich : JRP-Ringier, p. 5. 2) L'auteur remercie l'artiste pour les informations fournies et la relecture de la notice en date du 21 août 2013. 3) Cette série a notamment été montrée aux Rencontres photographiques d'Arles en 2011et en partie acquise par le Musée de l'Elysée à Lausanne. Pascal Ruedin, L'Ecole de Savièse. Une colonie d'artistes au coeur des Alpes vers 1900, Milan : 5 Continents, Sion : Musée d'art du Valais, 2012, p. 55. 4) Joël Vacheron, « Horizonville », dans Yann Gross, Horizonville, Zurich : JRP-Ringier, p. 5. 5) Ibid. 6) Ibid p. 6. 7) Welcome to Paradise : l'Ecole de Savièse, une colonie d'artistes au coeur des Alpes vers 1900, Musée d'art du Valais, Sion, 23 juin 2012 – 6 janvier 2013. 8) Pascal Ruedin, L'Ecole de Savièse. Une colonie d'artistes au coeur des Alpes vers 1900, Milan : 5 Continents, Sion : Musée d'art du Valais, 2012, p. 55. 9) L'artiste insiste toutefois sur le fait que le Valais a été choisi pour des questions de proximité et que le but de ses photographies n'est pas de porter un regard spécifique sur la société valaisanne. --- Yann Gross (*1981), Horizonville, 2005–2008, Fotoabzüge auf Aluminium (Datum der Abzüge: 2013), Kunstmuseum Wallis : • Horizonville, 2005, (5/5), 80 x 96 cm, Inv. BA 3304 • Gorilla, 2005, (2/5), 80 x 96 cm, Inv. BA 3305 • Lastwagen-Slalom, 2005, (3/5), 80 x 96 cm, Inv. BA 3306 • Rothis Western City, 2005, (3/5), 80 x 96 cm, Inv. BA 3307 • Line Dance, 2005 (4/5), 96 x 80 cm, Inv. BA 3308 • Berglöwe, 2005, (3/5), 96 x 80 cm, Inv. BA 3309 • Jimmy mit dem Clio Cross, 2005, (3/5), 96 x 80 cm, Inv. BA 3310 • Bär, (1/5), 96 x 80 cm, Inv. BA 3311 • Mündung des Illgrabens, 2008, (3/5), 96 x 80 cm, Inv. BA 3312 • Marc Swann, 2006, (3/5), 50 x 60 cm, Inv. BA 3313 • Lady Harley, 2007, (2/5), 60 x 50 cm, Inv. BA 3314 • Cathy Lavanchy, 2007, (2/5), 60 x 50 cm, Inv. BA 3315 Unweit der mythischen Berge, die so häufig die Schweiz symbolisieren, durchstreifte der Waadtländer Fotograf Yann Gross in bedächtiger Weise die Ebene des Rhonetals, welche die Touristen ohne Zwischenstopp durchqueren, auf einem dreimonatigen Roadtrip mit dem Mofa, wie der Held des Films Straight Story von David Lynch, der Hunderte von Kilometern auf einem Minitraktor zurücklegt und dem Fotografen als Vorbild diente (1). Indem der Künstler (2) auf der Suche nach weiten Räumen und grossen Abenteuern die Ebene ohne jede Eile in gemächlicher Fahrt mit reduzierter Geschwindigkeit erkundet, setzt er sich mit einer Welt auseinander, die ihm nahesteht, und entdeckt verschiedene bewusst exotische und unangepasste Lebensweisen. Stetsons, Tätowierungen, Cowboyhemden und Fransenjacken: die Kennzeichen der amerikanischen Kultur prägen diese fotografierte Welt der Serie Horizonville (3). Ein mythisches Bild der Vereinigten Staaten, durch die Western-Brille gesehen (4). Durch ihren Stil, ihren Namen und ihre Lebensweise suchen sich die Personen von der Region, in der sie leben, abzuheben (Berglöwe, BA 3309; Bär, BA 3311; Lady Harley, BA 3314; Cathy Lavanchy, BA 3315) und bilden eine Gemeinschaft mit besonderen Codes. Sie bringen Leben in Örtlichkeiten – Restaurant (Rothis Western City, BA 3307), Hotel, Tankstelle (Horizonville, BA 3304) – und begründen Veranstaltungen (Line Dance, BA 3308). Ihr Amerika ist jedoch europäisiert, wenn die Airstreams einfache Wohnwagen, die riesigen Trucks schlichte Lastwagen (Lastwagen-Slalom, BA 3306) und die Harley Davidsons nichts weiter als Mofas sind (Jimmy mit dem Clio Cross, BA 3310). Die Symbole, deren Ursprung und Bedeutung unwichtig zu sein scheinen, sind unklar und die Bezüge auf «Helden» gelegentlich unbeholfen, da die meisten Personen nie in den Vereinigten Staaten waren. Hier und Anderswo vermischen sich. Allerdings legt Yann Gross den Akzent auf das amerikanische Ideal, indem er sein Heldenepos mittels Fotografien dokumentiert, deren Ästhetik – Posieren der Personen oder Realismus der Darstellungen – an die amerikanische Tradition in Sachen Dokumentationsfotografie erinnert (5). Die Bilderfolge ist je nach Thema durch einen Massstab geprägt, der ständig wechselt. Die Kraft der Aufnahmen beruht auch auf ihrer Zahl, da die Serie ein einziges Ganzes bildet, das ein komprimiertes Bild der Vereinigten Staaten wiedergibt. Zu dieser Darstellung fügt der Fotograf durch seine Sichtweise, die gelegentlich bewusst ironisch zu verstehen ist (6), Glamour hinzu und preist dieses Wunschbild Amerikas in einfachen, leuchtenden und farbfreudigen Fotografien von eindrucksvollem Format. Die Amerikaner bleiben hier eine durch die fotografierten Personen idealisierte Nation, mit einigen wirkungsvollen Bildern, die in Form einer Serie dazu einladen, das komprimierte Muster eines Traums, des American Dream, zu entdecken. Die Serie Horizonville, die 2012 in der Ausstellung Welcome to Paradise (7) den Werken der Schule von Savièse gegenübergestellt wurde, kündet von dem Bemühen, sich in einem geografischen Raum, in dem man sich trotz dessen starker Identität ausdrücken kann, von einer Gemeinschaft zu emanzipieren. Paradoxerweise führt uns diese Arbeit ein weiteres Mal die Stereotypen des Kantons vor: das Wallis als «Reservoir malerischer Figuren, die in Bezug auf die zeitgenössische […] Gesellschaft kauzig erscheinen» (8), wie dies auch bei den Künstlern der Schule von Savièse der Fall sein kann (9). 1) Joël Vacheron, «Horizonville», in Yann Gross, Horizonville, Zürich: JRP-Ringier 2010, S. 5. 2) Der Autor dankt dem Künstler für die ihm gelieferten Auskünfte und die kritische Durchsicht des Artikels, die vom 21. August 2013 datiert. 3) Diese Serie wurde insbesondere 2011 an den Rencontres photographiques in Arles gezeigt und teilweise vom Musée de l’Elysée in Lausanne erworben. Pascal Ruedin, L’Ecole de Savièse. Une colonie d’artistes au coeur des Alpes vers 1900, Mailand: 5 Continents, Sitten: Kunstmuseum Wallis 2012, S. 55. 4) Joël Vacheron, a. a. O., S. 5. 5) Ebd. 6) Ebd., S. 6. 7) Welcome to Paradise: l’Ecole de Savièse, une colonie d’artistes au cœur des Alpes vers 1900, Kunstmuseum Wallis, Sitten, 23. Juni 2012 – 6. Januar 2013. 8) Pascal Ruedin, a. a. O., S. 55. 9) Der Künstler legt allerdings Wert auf die Feststellung, dass er das Wallis aus Gründen der Nähe wählte und dass seine Fotografien nicht bezwecken, einen besonderen Blick auf die Walliser Gesellschaft zu werfen.