Isaline Pfefferlé, 2019 :
Not Vital (*1948), Walking stick, 2012, acier inoxydable, 305 x 7.5 cm, Musée d’art du Valais, Sion, inv. BA 3439, achat en 2017 Réalisée en 2012 par l’artiste grison Not Vital (*1948), Walking stick est une sculpture issue d’une série de trois éditions. Si l’on en croit son titre, cette œuvre monumentale qui mesure plus de trois mètres de hauteur figurerait un « bâton de marche ». Cependant, l’œil est immédiatement confronté à son apparence en acier inoxydable, un métal auquel Not Vital recourt passablement dans sa pratique (1). À l’instar de l’artiste italien Giuseppe Penone (*1947) qui trouble la valeur formelle et naturelle des arbres en les soumettant à des modifications physiques relevant presque du surréalisme, Not Vital sublime le bois par l’acier mais conserve l’aspect formel de la branche d’arbre inhérente à l’objet « bâton de marche ». L’œuvre sculpturale de Not Vital stimule ainsi différents niveaux de perception et très souvent l’idée et sa manifestation phénoménologique sont en désaccord. Effectivement, dans le cas du Walking Stick, le bois brut devient lisse et froid : la valeur dégradable du végétal est pérennisée par l’enveloppe d’acier industriel. De cette contradiction entre le fond et la forme apparaît une étrange beauté, une agréable dissonance (2). Cette binarité sensible relève un paradoxe notoire : quelle est la valeur esthétique des choses que nous nous représentons ? Quel est l’équilibre entre ce que nous voyons et ce que nous pensons voir ? L’acier poli trouble la lecture littérale de l’œuvre et confronte le regard du spectateur à un jeu de dissolution spatiale entre la sculpture et son environnement : véritable miroir, l’œuvre reflète ce qui l’entoure et s’y confond. L’intégration de l’œuvre à la salle du Musée d’art du Valais intitulée « Corps et environnement », ne relève donc pas d’une décision scénographique innocente : le Walking stick se fond dans la colonne boisée contre laquelle il se dresse. L’œuvre et son contexte d’inscription se mêlent étroitement. Dans un « élan vertical » (3), le regard du spectateur rencontre la sculpture monumentale et s’y prolonge, dans une possible ascension qui recommence éternellement. Acquis en 2017 à la suite de l’exposition En Marche. Faire un pas, c’est faire un choix, le Walking Stick rappelle aussi le caractère éminemment autobiographique de l’œuvre de Not Vital (4). Confronté à l’altérité par les innombrables rencontres et voyages qu’il effectue entre les continents (5) (il vit entre son château à Tarasp-Scuol, Agadez au Niger et son île NotOna en Patagonie), l’artiste développe un langage plastique qui tend à l’universalité. Symbole de la vie de transhumance menée par son créateur et reflet littéral de sa perméabilité aux cultures de ce monde, ce bâton de marche pour géant est un véritable « archétype universel » (6). Car si « chaque œuvre est tributaire d’un processus de structuration similaire, du personnel au général, du biographique au collectif, du figuratif au signe » (7), le Walking Stick est une métaphore du va et vient incessant que l’artiste opère entre les Grisons et le monde, entre sa singularité et la collectivité, de son histoire personnelle à celle de l’humanité. 1) Parmi celles-ci: Unpleasant Object et Pelvis en 2008, Leading the Way en 2012, HEAD Self-Portrait en 2013, Moon en 2015 ou encore certaines de ses House to Watch the Sunset to de 2015, etc. Galerie Urs Meil, Not Vital, Stainless Steel : URL : https://galerieursmeile.com/artists/artists/not-vital/work.html (consulté le 1 juin 2019) 2) Beat Stutzer, Not Vital : Prints & Multiples, Coire, Musée des Beaux-Arts des Grisons, 1991, pp. 13. 3) Stutzer, ibid., 1991, p. 13-14. 4) Claude Ritschard, « Le « Veau d’or » ou la sculpture conceptuelle de Not Vital » in : Not Vital 11 décembre 1990-27 janvier 1991, Genève, Musée Rath, 1991, p.6. 5) Rukhasana Jahangir, Not Vital : MOVING & removing, Pékin, Galerie Urs Meile, 2013, p.3. [en ligne] URL : https://galerieursmeile.com/fileadmin/images/Artists/NOT_VITAL/NOT_VITAL_TEXTS/Jahangir_NotVital_MOVINGandRemoving_2013_E.pdf (consulté le 31 mai 2019) 6) Claude Ritschard, Ibid., 1991, p.6. 7) Ibid., p.7. --- Not Vital (*1948), Walking Stick, 2012, Edelstahl, 305 x 7.5 cm, Kunstmuseum Wallis, Sitten, Inv. BA 3439, Ankauf 2017 Der Walking Stick, der 2012 vom Bündner Künstler Not Vital (*1948) geschaffen wurde, ist eine Skulptur aus einer Serie von drei Editionen. Das mehr als drei Meter hohe monumentale Werk könnte laut seinem Titel einen «Wanderstock» darstellen. Allerdings ist sofort zu erkennen, dass das Objekt aus Edelstahl ist, ein Metall, das Not Vital in seinem Werk häufig verwendet (1). Wie der italienische Künstler Giuseppe Penone (*1947), der die formale und natürliche Beschaffenheit von Bäumen antastet, indem er sie physikalischen Veränderungen unterwirft, die fast surrealistisch wirken, sublimiert Not Vital Holz durch Stahl, behält aber den formalen Aspekt des Baumasts bei, der dem «Wanderstock» anhaftet. Not Vitals plastisches Werk stimuliert somit verschiedene Wahrnehmungsebenen, und häufig unterscheiden sich die Idee und ihr phänomenologisches Erscheinungsbild. Beim Walking Stick wird das rohe Holz glatt und kalt: Die Zersetzbarkeit des Pflanzlichen wird durch die Hülle aus Industriestahl für immer gestoppt. Dieser Widerspruch zwischen Substanz und Form lässt eine seltsame Schönheit und eine angenehme Dissonanz entstehen (2). Die sinnenhafte Binarität verweist auf ein bekanntes Paradox: Worin besteht der ästhetische Wert der Dinge, die wir uns vorstellen? Wo ist das Gleichgewicht zu finden zwischen dem, was wir sehen, und dem, was wir zu sehen meinen? Polierter Stahl stört das direkte Verständnis des Werks und konfrontiert den Blick des Betrachters mit einem Spiel räumlicher Auflösung zwischen Skulptur und Umwelt: Als wahrer Spiegel reflektiert das Werk seine Umgebung und geht in ihr auf. Die Unterbringung des Werks in den Raum, der im Kunstmuseum Wallis dem Thema «Körper und Umwelt» gewidmet ist, beruht folglich nicht auf einer naiven szenografischen Entscheidung: Der Walking Stick verschmilzt mit der hölzernen Stütze, an die er gelehnt ist. Das Werk und sein Kontext sind eng miteinander verknüpft. In einem «vertikalen Elan» (3) begegnet der Blick des Betrachters der monumentalen Skulptur und gleitet empor in einem möglichen Aufstieg, der unaufhörlich neu beginnt. Im Jahr 2017 im Anschluss an die Ausstellung Unterwegs. Ein Schritt, eine Richtung erworben, erinnert der Walking Stick auch an den ausgeprägt autobiografischen Charakter des Werks von Not Vital (4). Aufgrund seiner zahllosen Begegnungen und Reisen auf verschiedenen Kontinenten (er lebt zwischen seinem Schloss in Tarasp-Scuol, Agadez in Niger und seiner Insel NotOna in Patagonien) mit der Andersartigkeit konfrontiert, entwickelt der Künstler eine plastische Sprache, die zur Universalität neigt. Als Symbol für das von seinem Urheber gelebte Leben der Transhumanz und als buchstäbliches Spiegelbild der Empfänglichkeit des Künstlers für die Kulturen dieser Welt ist dieser Wanderstock für Riesen ein wahrer «universeller Archetyp» (5). Denn wenn «jedes Werk von einem ähnlichen Strukturierungsprozess abhängig ist, der vom Persönlichen zum Allgemeinen, vom Biografischen zum Kollektiven und vom Figurativen zum Zeichenhaften führt» (6), ist der Walking Stick eine Metapher für das unaufhörliche Kommen und Gehen des Künstlers zwischen Graubünden und der Welt, zwischen seiner Einzigartigkeit und der Gemeinschaft, zwischen seiner persönlichen Geschichte und jener der Menschheit. 1) Darunter: Unpleasant Object und Pelvis 2008, Leading the Way 2012, HEAD Self-Portrait 2013, Moon 2015 oder einige seiner House to Watch the Sunset von 2015 usw. Galerie Urs Meile, Not Vital, Stainless Steel: URL: https://galerieursmeile.com/artists/artists/not-vital/work.html (besucht am 1. Juni 2019). 2) Beat Stutzer, Not Vital: Prints & Multiples, Chur, Kunstmuseum Graubünden, 1991, S. 13. 3) Stutzer, a. a. O., S. 13–14. 4) Claude Ritschard, «Le ‘Veau d’or’ ou la sculpture conceptuelle de Not Vital» in: Not Vital 11 décembre 1990 – 27 janvier 1991, Genf, Musée Rath, 1991, S. 6. 5) Ritschard, a. a. O., S. 6. 6) A. a. O., S. 7.